La Sécurité Sociale à la française s’est montré pendant des décennies et encore actuellement plus efficace, face à la crise, que les modèles privatisés.

Pourtant, depuis les années 1990, plutôt que de la renforcer en élargissant l’assiette des cotisations sur lesquelles est basé son financement, les gouvernements successifs ont inversé la logique en « fiscalisant » la Sécu (CSG, CRDS, impôts et taxes dont la TVA). Ils ont sans cesse limité les dépenses sociales pour les ajuster aux recettes qu’ils réduisent afin d’augmenter les marges des entreprises (allègements et/ou exonérations des cotisations sociales employeurs sur les bas salaires dont le montant en 2020 est de 75 Mds €). Au nom de politiques publiques supposées soutenir l’emploi et de « baisse du coût du travail » et sous prétexte de « transformation du CICE en baisse de charges pérennes », la réduction générale sur les bas salaires a été étendue en 2019 aux cotisations patronales de retraite complémentaire et à celles de l’assurance-chômage (La FSU dénonce toujours le fait que ces mesures ne soient plus intégralement compensées par l’État depuis 2019).

Cette réduction organisée des recettes rend nécessaire le recours à des complémentaires.

Une ordonnance prise par le gouvernement en application de la loi de Transformation de la Fonction Publique du 6 août 2019 (dont la FSU demande toujours l’abrogation) instaure la Protection Sociale Complémentaire (PSC), avec participation de l’employeur, dans toute la Fonction publique.

Elle introduit des éléments de redéfinition de la protection sociale qui ne répondent pas au mandat du 100 % sécu porté par la FSU, ni ne dessinent les contours d’un modèle fondé sur la solidarité, hors des logiques marchandes, de concurrence ou de profit et dont le principe « cotiser selon ses moyens et recevoir selon ses besoins » serait accessible à tous.

Dans les négociations pour la FP de l’État, la FSU a cherché à obtenir un niveau de couverture interministériel de haut niveau et a contribué à ce que l’accord instaure des mécanismes de solidarités, même s’ils restent à ce stade toujours insuffisants. Le texte final propose ainsi des modalités de mise en œuvre de la PSC meilleures que celles de l’ordonnance qui, sans accord majoritaire des organisations syndicales sur la PSC, se seraient appliquées.

Dans ce contexte, la FSU assortit sa signature d’un engagement à « œuvrer à la création d’un arc syndical et politique le plus large possible, pour une reconquête d’une assurance maladie obligatoire qui rembourse à 100% les besoins prescrits ».


Accord PSC : décryptage

L’accord comporte des clauses ne correspondant pas aux mandats de la FSU :

  • il instaure une obligation d’adhésion des agents au contrat qui aura été choisi par l’employeur ;
  • il maintient et peut aggraver la rupture des solidarités qui existent actuellement entre les actifs et les retraités ;
  • il maintient la séparation (introduite dans le statut par l’ordonnance de février 2021) de la santé et de la prévoyance, au risque d’entraîner un fort recul de la mutualisation des risques, une augmentation de non-couverture et une augmentation des cotisations dans ce domaine ;
  • il renforce la place des complémentaires-santé tout en créant de nouvelles opportunités pour les sociétés d’assurance à but lucratif.

Mais aussi des avancées  :

  • il renforce la participation des employeurs publics de l’État à la PSC pour leurs agents sur la base d’un ensemble de prestations supérieur aux prestations minimales fixées par le code de la Sécu ;
  • il permet l’accès à une complémentaire à tous les agents ;
  • il limite les inégalités entre ministères ainsi que le développement des options et surcomplémentaires ;
  • il comprend, grâce aux interventions syndicales, des mécanismes de solidarités : familiales, entre niveaux de rémunération (Ainsi une partie de la cotisation des actifs sera proportionnelle à leur salaire), envers certains précaires et envers les retraités. Ceux-ci restant à ce stade très insuffisants, la FSU avec ses partenaires syndicaux mènera campagne pour les renforcer.

En l’état de la situation créée par l’ordonnance et l’accord relatif à la PSC, la part d’inconnues (volet prévoyance, mais aussi évolution de la cotisation d’équilibre) reste importante et ne garantit pas suffisamment la protection des agents sur le long terme.

La FSU dénonce aussi l’absence de participation directe de l’État au paiement de la cotisation de PSC pour ses agents retraités dont il prend pourtant en charge directement le financement des pensions. La pension étant un salaire continué, les cotisations employeurs qui s’y rattachent doivent être prolongées elles aussi : cette injustice est inadmissible !


Un accord négocié sous la contrainte :

En effet, dans le nouveau cadre législatif imposé par le gouvernement …

  1. La non-signature majoritaire de l’accord interministériel avec l’application la plus restrictive de l’ordonnance entraînait une dégradation immédiate considérable de la protection sociale complémentaire des agents actifs et retraités dès 2024, ainsi qu’une accélération des ruptures de solidarités intergénérationnelles déjà à l’œuvre ;
  2. Dans tous les cas, aucun retour à l’existant (aussi imparfait soit-il !) n’étant possible, le nouveau système s’appliquait !
  • Signer, c’était éviter le pire car l’ordonnance de février 2021, au lieu de prévoir une prise en charge minimum d’environ 30 euros mensuels, la ramenait à 12-15 euros ;
  • Ne pas signer (alors que les autres orgas représentatives le faisaient), c’était être marginalisé et ne plus pouvoir intervenir ensuite sur les évolutions du dossier car étant, dès lors, privé de participation au comité de suivi interministériel et à toute nouvelle négociation …

La FSU dénonce cette forme de chantage instauré par le nouveau cadre législatif !


Cette modification de la protection sociale des fonctionnaires s’inscrit dans le cadre plus général de la politique néo-libérale menée depuis près de 5 ans qui accroît les inégalités et affaiblit les services publics tout en diminuant les droits de ses agents.

Les inégalités n’ont cessé de progresser et l’enrichissement d’une minorité d’ultra-riches pendant la pandémie connaît un record. En quelques mois, les 10 plus grandes fortunes françaises ont progressé de 86% tandis que le gel du point d’indice depuis 2010 conduit à des pertes de pouvoir d’achat des agents de la Fonction publique, que le recours à l’aide alimentaire n’a jamais été aussi important dans notre société et que notre système de santé est très fragilisé !

La FSU continuera à s’opposer et à mobiliser les personnels contre cette politique. Dans cette perspective, elle met toute son énergie à construire le cadre intersyndical de lutte pour imposer une autre réforme, plus juste et plus solidaire, porteuse de l’instauration du 100 % Sécu.

Les organisations syndicales ont une responsabilité pour construire les conditions de la mobilisation la plus large pour défendre nos acquis sociaux, en premier lieu la Sécurité Sociale et notre système de retraites par répartition. La FSU y contribuera pleinement !